Trafic de cryptophones : 48 arrestations et 1,2 million saisi lors de 200 perquisitions

Plus de 200 perquisitions mobilisant quelque 1.600 policiers ont été menées mardi matin à Anvers, Bruxelles, Charleroi et Liège dans le cadre d'un dossier visant une organisation criminelle soupçonnée de fournir des téléphones cryptés au milieu criminel, a indiqué mardi en fin de journée le parquet fédéral. Il s'agit de la plus grande opération jamais organisée dans le pays. Au total, 48 personnes ont été privées de liberté pour audition et plus d'1,2 million d'euros ont été saisis. Les policiers ont également confisqué 15 armes prohibées dont 6 armes à feu, 8 véhicules de luxe, 3 machines pour compter l'argent, des uniformes de police et des balises GPS.

Le constat a été posé, sur base du travail policier, que les organisations criminelles utilisaient de plus en plus souvent des "cryptophones". Avant cette opération, 185 de ces téléphones, équipés du logiciel de cryptage de SKY ECC, une société opérant depuis le Canada et les Etats-Unis, avaient été saisis en Belgique.

Seule l'application de SKY ECC est disponible sur ces appareils, qui ne peuvent recevoir des messages écrits et vocaux ainsi que des images que d'autres utilisateurs du service. Le prix d'un téléphone est estimé entre 800 et 2.200 euros pour un abonnement de 6 mois. 

Après saisie de tels appareils, la police est confrontée à l'incapacité technique d'en tirer des informations. Estimant que les services fournis semblent poursuivre exclusivement l'objectif de rencontrer des besoins criminels, le parquet fédéral a ouvert fin 2018 une information contre SKY ECC et contre les personnes qui distribuent ces téléphones dans le milieu criminel. L'enquête a été initiée par la police judiciaire fédérale (PJF), et plus particulièrement la PJF d'Anvers. Un juge d'instruction du tribunal de première instance d'Anvers, division Malines, a été saisi en juin 2019. 

Environ 1 milliard de messages cryptés ont été interceptés dans ce dossier et près de la moitié ont pu être décryptés, en collaboration avec les Pays-Bas. Le Centre de cybersécurité belge et la Sûreté de l'Etat ont prêté assistance à la PJF d'Anvers. La police fédérale a réclamé à SKY ECC la prime de 5 millions de dollars que l'entreprise promet à celui qui parviendrait à "craquer" son système, a remarqué le procureur fédéral, Frédéric Van Leeuw.

Le procureur du roi d'Anvers estime que cette enquête a permis à la justice de se faire "une idée de la manière dont les criminels opèrent lorsqu'ils discutent quotidiennement de leurs activités". "Nous sommes parvenus à créer une brèche dans les murs du crime organisé à travers tout le pays. A partir d'aujourd'hui, nous nous engouffrons dans cette brèche. (...) Mais, le combat est loin d'être gagné... La criminalité est flexible", ajoute Franky De Keyzer.

Le directeur judiciaire de la PJF d'Anvers, Yve Driesen, a remarqué que "les défis technologiques, en particulier le décryptage, le traitement des 'big data' par les services de renseignement et la conduite d'enquête complexe se conjuguent". Selon Eric Snoeck, le directeur général de la PJF, cela "exige que nous continuions à développer la police judiciaire fédérale pour répondre aux défis posés par la criminalité organisée". 

Des dossiers distincts ont été ouverts et des interventions menées en réaction à la lecture de certains messages. Plus de 14 tonnes de cocaïne ont ainsi pu être interceptées. D'autres dossiers seront ouverts au cours des mois à venir dans les différents parquets concernés.

Les ministres fédéraux de la Justice Vincent Van Quickenborne et de l'Intérieur Annelies Verlinden ont applaudi mardi soir par communiqué l'opération réalisée, remerciant parquet et police judiciaire et soulignant la bonne coopération avec les services étrangers et Europol. "On peut être fier", estime la ministre Verlinden. 

A la demande du juge d'instruction, les personnes utilisant un téléphone SKY ECC à des fins légales sont priées de se faire connaître.

 

Source : Belga

Recommandations

Image

Drogue : vaste opération de police à Amay et Engis