Le jeu vidéo, plus accessible que jamais ?
Le jeu vidéo fait aujourd'hui partie intégrante de notre société. Pourtant, cela reste difficile pour tous d'accéder à ce médium. Notamment pour les malvoyants. Une situation qui pourrait commencer à changer tout doucement. Nous nous sommes rendu au centre de La Lumière à Liège pour rencontrer un malvoyant adepte de la manette !
Esteve parcourt avec aisance le monde virtuel de The Last of Us 2, dernière grosse sortie de Sony sur sa console : la PlayStation 4. Celui-ci trouve aisément son chemin et combat les ennemis sans peine. Des prouesses qui peuvent sembler banales pour un joueur classique, mais il n'en est rien car Esteve est malvoyant. The Last of Us 2 avait pour objectif de se rendre plus accessible, un pari qui semble réussi. "En fait, sur la Playstation, c'est le premier jeu que je connais qui est vraiment accessible." Nous explique Esteve Deubel, agent logistique de La Lumière. "Alors, entendons-nous, je dirais qu'il est accessible à 100% pour un malvoyant. Pour un non-voyant il y a des options qui sont là mais je pense qu'il y a encore du progrès à faire."
Il faut se diriger... À l'oreille !
Ici, l'expérience de jeu passe en grande partie par l'ouïe. Il y a tout un glossaire de son à connaître pour pouvoir réagir au moment opportun. Une synthèse vocale lit également les menus au joueur. Cette passion du jeu vidéo, Esteve la partage avec sa fille qui possède une déficience visuelle différente. L'accessibilité de ce jeu représente pour eux un grand pas en avant, mais ils espèrent voir encore certaines améliorations avec le temps. "Ce serait bien que la synthèse parle un peu plus pour nous expliquer où on est, etc." souligne Aurore Deubel. "Ici on ne sait pas où on va et on ne sait pas ce qui se trouve dans les alentours." Esteve espère, quand à lui, que les éditeurs porteront une oreille attentive aux remarques des joueurs malvoyants pour pouvoir améliorer le jeu. Celui-ci reçoit de nombreuses sollicitations d'adolescents malvoyants qui aimeraient pouvoir jouer à la console, mais l'accessibilité est rarement là. "Au niveau programmation, ici, commandes, etc, tout est au top. Par contre il faudrait un peu plus de description dans le jeu." raconte Esteve Deubel. "Il faudrait que ce soit plus précis, différencier les sons par rapport à l'action. Par exemple, pour monter à cheval ou ouvrir un tiroir on entend le même son."
L'accessibilité du jeu vidéo pourrait s'accentuer dans le futur.
The Last of Us 2 propose plus de 60 options différentes pour le rendre accessible au plus grand nombre. Une décision qui n'est pas réellement le fruit du hasard, une loi américaine oblige depuis quelques années tous les médias numériques avec des échanges de communications à se rendre accessibles. Cette loi s'applique aux médias développés sur le territoire américain, pas forcément aux jeux importés. "Comme The Last of Us 2 est en développement depuis 7 ans... Ils étaient dans l'obligation, sous peine d'avoir des amendes, de prendre en compte ces éléments." Nous explique Gilles Banneux, journaliste jeux vidéo et chroniqueur pour l'émission Game In de RTC. "Donc on pourrait se dire que c'est de l'opportunisme mais ce qui importe c'est que cela permet enfin d'ouvrir le jeu vidéo à un public plus large !"
Certains jeux, développés en Amérique, doivent aussi être patchés pour respecter cette loi.
La Lumière, attentive à ces nouveautés
Il n'y a pas de secteur "jeu vidéo" au centre de La Lumière à Liège. C'est un peu le fruit du hasard qui nous a amené à rencontrer Esteve. Mais l'ASBL se réjouit de cette découverte, la technologie occupant une place très importante dans leurs activités. "Pour nous c'est vraiment un plus sur lequel on va travailler parce qu'on trouve cela très important. Et on voit bien que c'est une source d'épanouissement pour les personnes déficientes visuelles". Détaille Line Brasseur, chargée de communication pour l'ASBL La Lumière.
Nous avons été invités à nous essayer à l'expérience à l'aide de lunettes de simulation. Notre performance ne marquera par contre pas l'histoire, nous sommes restés bloqués... face à la première porte !
Pierre Devillers et Benoît Elsen