Scandale au 4e bataillon génie d'Amay: résumé complet de la situation
Un certain nombre de militaires du 4e bataillon génie d'Amay ont été suspendus préventivement de leurs fonctions en raison de "faits graves", à caractère "structurel", ont annoncé jeudi trois hauts responsables du ministère de la Défense. Parmi les 600 hommes et femmes que le bataillon compte, quelques dizaines seraient concernés.
Un peloton de ce bataillon a été dissous, a indiqué la ministre de la Défense, Ludivine Dedonder, au cours d'une conférence de presse à Bruxelles, en parlant de "mesures fortes" en réponse à des comportements qu'elle a qualifiés d'"inacceptables" et de "déviants". Elle a évoqué des faits relevant des "coups et blessures", de "pressions" pour imposer le silence, de "chantage".
Certains comportements sont "incompatibles" avec les valeurs de la Défense, a pour sa part déclaré le "patron" de l'armée, l'amiral Michel Hofman.
"Des faits et comportements dégradants et humiliants"
Il s'agit de "quelques dizaines" de militaires, "pas seulement des jeunes recrues, mais aussi des militaires expérimentés", à la fois officiers, sous-officiers et volontaires, a ajouté le chef de la Défense (Chod) devant la presse. Certains sont acteurs, d'autres témoins et/ou victimes, a-t-il expliqué en évoquant un "problème structurel" au sein de ce bataillon et une dilution inquiétante des normes et des valeurs Il a parlé de "faits et comportements dégradants et humiliants, portant dans certains cas "atteinte à l'intégrité physique" des personnes, mais pas à caractère sexuel.
Certains faits se sont déroulés durant plusieurs mois, voire années, lors de bizutages ou de rituels d'intégration, mais aussi lors d'entraînements ou en dehors des heures de service, avec parfois un rôle joué par l'alcool. Les plus anciens semblent remonter à 2021.
L'amiral Hofman a parlé, à propos de la dissolution d'un peloton (une trentaine de personnes, ndlr, commandé en principe par un officier) de ce bataillon d'une décision "grave" et "probablement unique" dans l'histoire récente des forces armées belges.
Aucun fait de racisme n'a été rapporté jusqu'à présent, a pour sa part assuré l'inspecteur général de la Défense, le vice-amiral Jan De Beurme.
Des enquêtes administrative interne et judiciaire sont en cours et pourraient mener à ses sanctions disciplinaires. Un certain nombre de militaires ont été suspendus à titre conservatoire. D'autres ont été mutés vers d'autres services de la Défense, a précisé Mme Dedonder (PS) sans révéler de chiffres précis.
Mme Dedonder a indiqué avoir été personnellement informée en novembre dernier par des canaux externes - en fait un courriel envoyé par un membre d'une famille d'un militaire - de problèmes structurels au sein de cette sous-unité du bataillon caserné à Amay et qui regroupe différentes spécialités. Elle a ordonné l'ouverture d'une enquête au chef de la Défense, qui l'a confiée à l'Inspecteur général et qui s'annonce "complexe".
La ministre a assuré que son département a fait tout ce qui était en son pouvoir pour soutenir les victimes.
"La Défense reflet de la société", a encore dit l'amiral Hofman, tout en saluant le travail effectué par l'immense majorité de son personnel.
"Bien que ces faits jettent une ombre sur l'engagement sans faille de la grande majorité de nos collaborateurs ainsi que sur notre image, ils restent heureusement des exceptions. En tant qu'organisation, nous ne pourrons jamais accepter de tels comportements ! A l'avenir aussi, je compte sur chacun d'entre vous pour condamner et dénoncer ces comportements via les canaux existants (la chaîne de commandement, les conseillers en prévention, les personnes de confiance ou les canaux de l'Inspection générale). Assumons ensemble cette responsabilité", a déclaré le Chod dans un message adressé à l'ensemble du personnel - militaire et civil - du département.
En complément, retrouvez ci-dessous la déclaration complète de la ministre de la Défense, Ludivine Dedonder:
"À la fin de l'année 2023, j'ai été informée de problèmes structurels au 4e bataillon génie d'Amay. Nous parlons entre autres de traitements dégradants, de coups et blessures, de chantage, de menaces entre soldats, de pressions exercées par des militaires sur des pairs et d'une obligation de silence sur ces faits. Ceux-ci se sont déroulés sur plusieurs mois dans ce bataillon. Parmi les personnes impliquées, il y a des officiers, des sous-officiers, des volontaires, des soldats expérimentés et d'autres moins. Je tiens à préciser que ce n'est pas l'ensemble du personnel de ce bataillon qui est impliqué. Il s'agit de quelques dizaines de personnes.
Ces agissements sont inacceptables au sein de notre organisation. C'est pourquoi nous prenons des mesures fortes sur la base des informations dont nous disposons aujourd'hui. Ces comportements ne seront pas tolérés sous mon mandat. Aucun personnel de la Défense ne peut, ni ne doit tolérer, de tels agissements, les reproduire ou en être témoin sans prendre action. Sur la base des informations dont nous disposons aujourd'hui, un peloton est dissous. Il s'agit d'une mesure sévère par laquelle l'inspecteur général, le chef de la Défense et moi-même voulons envoyer un signal fort. Ce qui s'est passé est inacceptable, c'est une mesure sévère, mais c'est la seule façon de mettre fin à ces agissements.
Le ministère de la Défense a entendu et fourni aux victimes tout le soutien psychosocial dont elles avaient besoin. Le bien-être du personnel de la Défense est notre priorité absolue. Notre service des ressources humaines est impliqué dans le suivi de ce dossier afin de prendre les mesures nécessaires le cas échéant pour protéger et guider les personnes ou prendre des mesures disciplinaires.
Je souhaite également appeler les personnes qui sont témoins de ce type d'agissements à en parler à leur hiérarchie ou à des personnes de confiance."
(Belga & P.J.)