Dispositifs anti-sdf : nécessaire ou honteux ?
Le 3 octobre à Liège ont poussé de bien étranges fleurs. En effet, le numéro 67 du boulevard de la Sauvenière et le numéro 48-50 du boulevard Piercot se sont équipés « d’œuvres d’arts » qui sont en fait des installations anti-sdf. Ces deux aménagements ont pour but d’empêcher les sans-abris de se coucher dans les porches d’entrées des deux immeubles.
Boulevard de la Sauvenière, des plots rectangulaires ont été collés au sol. Cependant dans la nuit du 3 au 4 octobre, ceux-ci ont été arrachés par des mécontents. La mesure qui semblait temporaire (puisque facile à retirer) est donc devenue définitive puisque le matin suivant, des trous étaient forés dans la pierre au sol afin de fixer les plots de manière plus solide.
Boulevard Piercot, ce sont des plots bien plus pointus, en forme d’obélisques, qui ont été fixés. La police considérait d’ailleurs que cette installation était dangereuse dû aux pointes perçante des plots et une barrière Nadar avait été placée par la ville afin d’éviter tous risques pour les passants. Mais depuis, des ouvriers sont venus limer le dessus les plots, afin d’aplatir les pointes et d’éviter tout risque pour les passants.
Les deux bâtiments étant des espaces privés, les propriétaires ont le droit d’y installer de tels aménagements sans permis du service de l’Urbanisme. Cela fait cependant grincer des dents parmi les citoyens et les associations d’aide aux sans-abris. Questionné à ce sujet, Ludwig Simon, porte-parole des mendiants à Liège, s’est dit outré par de tel aménagement. « Ce sont des pics à pigeons, dangereux aussi bien pour les sdf que pour les étudiants. Les sans-abris sont traités comme des nuisibles. C’est du racisme anti-sdf. En plus, la ville ne respecte pas son devoir par rapport à la sécurité des citoyens. C’est dangereux, ils devraient être retirés.»
Willy Demeyer a tenu à réagir en expliquant que ce type d’aménagement urbain n’a besoin d’aucun permis (et donc n’est pas du ressort de la ville). Il explique comprendre les points de vue de chacun et travailler « à l’élaboration d’un plan de prise en charge global et intégré comprenant un centre d’accueil bas-seuil permettant de renforcer l’accroche sociale pour ce public spécifique, une amplification du programme de logement Housing First et la possibilité pour le CPAS d’avancer les 2 mois de caution (au lieu d’un) nécessaires pour la location d’un logement ».
Ce n’est pas la première fois que des aménagements comme ceux-là sont entrepris à Liège. En 2015, un mur avait été construit sous la passerelle des Chiroux pour empêcher les sdf de s’y installer. Baptisé « mur de la honte », il finit par être détruit sous la pression populaire, et ce malgré l’approbation des commerçants aux alentours. Plus récemment, en avril de cette année, la ville a installé des abribus dont les bancs sont équipés d’accoudoirs, divisant le banc et empêchant les sans-abris de s’y coucher. Bien que beaucoup pense que là aussi les SDF étaient clairement visés, la Ville de Liège s’est défendue en expliquant que l’idée n’avait jamais été d’éloigner les SDF mais de donner plus de confort aux usagers des TEC. Deux mois plus tard, elle a voté une motion disant qu’elle serait plus attentive aux futurs achats de mobiliers urbains.