Paifve en manque de personnel : les internés manquent de soins
Ce mercredi 14 octobre, le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire a présenté les résultats d'un rapport d'enquête au sujet de l'établissement de défense sociale de Paifve.
Dans un communiqué, le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire détaille sa position.
"Ni une prison, ni un hôpital psychiatrique, cet établissement accueille près de 200 internés. Un internement ayant été ordonné, cela signifie qu’en raison de leur état mental, ils ont été reconnus irresponsables pénalement des actes commis et condamnés à une mesure de sûreté destinée à protéger la société, en lieu et place d’une peine de prison et ce, pour une durée indéterminée.
Ni une prison, car bien que les bâtiments aient initialement été construits comme tels et dépendent de l’administration pénitentiaire, le régime appliqué n’est pas uniquement carcéral puisque les patients internés requièrent des soins adaptés.
Ni un hôpital psychiatrique car bien que destiné à la prise en charge médicale des patients internés, la gestion decet établissement, son personnel et les soins qui y sont dispensés ne relèvent pas des compétences de la SantéPublique mais bien de la Justice.
Bien que largement méconnu du grand public, cet établissement fait, de longue date, l’objet d’une surveillance attentive de la part non seulement de la Commission de Surveillance mais également du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) qui y a rendu pas moins de 4 visites, ainsi que de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Et pour cause, l’accès aux soins des patients internés y est non seulement aléatoire vu le déficit persistant en personnel mais y est également peu consistant.
Avec 4 psychiatres, 2 médecins généralistes présents à tour de rôle, moins de 10 infirmiers, une équipe paramédicale restreinte et du personnel de surveillance souffrant d’absentéisme grave et chronique, il n’est pas difficile d’imaginer que les patients internés sont très loin de bénéficier des soins requis par leur état, et encore moins en vue de leur réinsertion dans la société.
Mis en place en avril 2019, le nouveau Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire, organe para-parlementaire indépendant et impartial de contrôle et d’avis veillant à garantir les droits et la dignité humainedes personnes détenues, y a réalisé une première visite ad hoc les 5 et 6 mars dernier. Un rapport circonstancié aété établi dans la foulée incluant de très nombreuses recommandations à l’adresse du Ministre de la Justice, de l’administration pénitentiaire mais également du Ministre de la Santé publique.
Dans l’attente de la construction d’un centre de psychiatrie légale à Paifve, dont le projet est reporté à une dateinconnue, et du transfert des compétences en matière de santé de la Justice à la Santé Publique, le Conseil Central rappelle que la dignité et les droits fondamentaux des patients internés au sein de l’établissement dedéfense sociale de Paifve ne doivent pas être ignorés et que les moyens suffisants doivent être alloués à la miseen œuvre effective des objectifs de la mesure d’internement.
Enfin, dans son rapport, le Conseil Central rappelle la jurisprudence abondante de la Cour européenne des droits de l’Homme à l’encontre de la Belgique jugeant notre système d’internement dysfonctionnel de manière structurelle en ce qu’il ne garantit pas la dignité des patients concernés.
A l’heure où l’administration pénitentiaire envisage d’ouvrir deux nouvelles sections de défense sociale de 30 places chacune en prison à Bruxelles et à Namur pour parer à l’insuffisance de place dans les structures psychiatriques adaptées, le Conseil Central émet les plus vives préoccupations quant ce projet qui ne résout en rien le problème structurel en matière d’internement mis en évidence à différentes reprises par la Cour Européenne des Droits de l’Homme."